« Pour que nous ayons le même niveau d’information, le ministère nous a d’abord présentél’index, et ses cinq indicateurs (*) qui visent à mettre en évidence, et éventuellement sanctionner, les écarts salariaux entre les femmes et les hommes. Ensuite, la Dares (direction de la statistique du ministère du travail) nous a restitué les résultats des tests menés sur les données sociales disponibles de 40 000 entreprises, ce qui représente 10 millions de salariés, pour voir ce que donne l’application de cet index (Ndlr : lire ces résultats dans l’encadré ci-dessous). Petit bémol : il s’agit de données de 2015, et seuls deux indicateurs ont été testés, l’indicateur n°1 (écarts salariaux F/H) et l’indicateur n°5 (part des femmes dans les plus hautes rémunérations). Seuls ces deux indicateurs ont été testés car les autres données requises pour les autres indicateurs, comme par exemple les augmentations de salaire après un congé maternité, n’étaient pas disponibles dans ces données. En revanche, nous n’avons pas eu de retour sur les simulations pratiquées sur une vingtaine d’entreprises volontaires, au motif qu’il s’agissait pour le gouvernement de calibrer l’outil. Mais justement, nous aurions préféré avoir toutes ces informations en amont du décret qui définit ces indicateurs, afin d’en débattre.
Concernant l’indicateur 5 sur la proportion des femmes dans les plus hautes rémunérations, ce sont les plus grandes entreprises qui ont les plus mauvais résultats : pas moins de 42% sont en-dessous de la moyenne. L’autre aspect frappant concerne l’indicateur n°1 : les entreprises qui satisfont le plus aux critères de l’index sont celles des secteurs d’activité à bas revenus, là où sont employées de nombreuses femmes, là où les salaires sont bas. Cela n’est pas très étonnant : dans les entreprises où les salaires sont au niveau du Smic et où les évolutions salariales et les promotions sont faibles, il y a peu d’écarts entre les femmes et les hommes. Et globalement, l’on peut dire que la plupart des entreprises testées par la Dares obtiennent la moyenne de l’index (soit 75 points), ce qui leur évite toute sanction. Mais ces simuations ne permettent pas d’indiquer si les indicateurs retenus sont pertinents ou non, il faudra effectuer une analyse fine pour les évaluer. Ce qui nous inquiète, c’est que les entreprises de plus de 1 000 salariés doivent avoir mis en place ces index d’ici le 1er mars prochain, ce qui ne laisse aux entreprises et aux délégués syndicaux voire aux CSE qu’un mois et demi pour négocier la définition des panels, par exemple. Il nous faut nous aussi du temps pour former nos délégués syndicaux sur un mécanisme quand même très complexe. Si tous les partenaires sociaux en sont d’accord, je pense qu’il faudrait obtenir un délai supplémentaire afin que l’index puisse réellement s’appliquer. La CFTC a d’ailleurs demandé des mesures d’accompagnement, à la fois pour les entreprises et pour les délégués syndicaux. Cet outil peut être un pas important vers l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais pour que cela fonctionnne, il faut qu’il soit bien compris par les entreprises et par les organisations syndicales.
Le ministère du Travail nous a indiqué qu’un tableur Excel était pratiquement prêt et sera rapidement utilisable par les entreprises, le ministère prépare aussi une foire aux questions et, en effet, le conseil supérieur de l’égalité professionnelle va travailler dès la semaine prochaine sur un guide pratique. Le gouvernement demande par ailleurs à la direccte (direction du travail) d’accompagner durant le premier semestre les entreprises dans la mise en place de l’index et de prévoir, dès le deuxième semestre, de faire appliquer la loi. L’enjeu est capital. Si nous n’arrivons pas à trouver les causes des inégalités entre les femmes et les hommes et si nous n’arrivons pas à les corriger, nous allons traîner les conséquences de ces inégalités pendant de très longues années, et elles seront mêmes amplifiées, nous le savons, au moment du départ en retraite des femmes. Il nous faut donc réussir à parvenir à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, il n’y a aucune raison qu’une femme soit moins bien formée, soit moins bien rémunérée et soit moins bien promue qu’un homme. Il nous faut viser le maximum d’autonomie pour les femmes salariées ».
(*) Ces 5 indicateurs sont l’écart salarial F/H, les augmentations individuelles, l’écart de promotion entre les deux sexes, les augmentations de retour de congé maternité, le nombre de femmes ayant perçu les plus hautes rémunérations de l’entreprise, le tout donnant une note globale sur 100 points, l’obtention de 75 point évitant une sanction pour discrimination (lire notre article).
Les résultats de la simulation de l’index selon le ministère du Travail
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Le ministère du Travail a communiqué hier les résultats du test effectué sur 40 000 entreprises de plus de 50 salariés sur 2 des 5 critères de l’index F/H. Pour le critère 1 (écarts salariaux F/H), la simulation montre qu’obtiennent entre 30 et 39 points (le nombre de points possible va de 0 à 40 points sur ce critère) :
Mais sur ce critère d’inégalité salariale, les disparités sont importantes selon le secteur d’activité. Les secteurs les plus égalitaires sont l’hébergement-restauration (91% de ces entreprises obtiennent au moins 30 points sur 40), les transports, l’administration et l’enseignement. Les moins égalitaires sont la construction (46% seulement des entreprises ont au moins 30 points), les activités finances-assurance, les activités scientifiques, l’information-communication, etc. Pour le critère 5 (nombre de salariés du sexe sous-représenté parmi les 10 plus hautes rémunérations de l’entreprise), un dossier qui peut valoir de 0 à 10 points, la simulation montre qu’obtiennent les meilleures notes les petites et moyennes entreprise :
Sur cet indicateur 5, 42% des entreprises n’obtiennent donc pas la moyenne requise. |
Source – Actuel CE