Si l’employeur a l’obligation de mettre à disposition dès 200 salariés un local syndical à disposition des sections syndicales présentes, ce local ne saurait être de droit le siège statutaire des syndicats qui ont constitué ces sections. Sur ce point, rien n’est possible sans l’accord de l’employeur.

C’est une règle qui n’a pas été remise en cause par les ordonnances Macron : au-delà du seuil de 200 salariés, la section syndicale doit bénéficier d’un local. Plus précisément :

  • de 200 à 999 salarié : l’employeur met à la disposition des sections syndicales un local commun convenant à l’exercice de la mission de leurs délégués (NB : le projet de loi Pacte veut relever ce seuil de 200 à 250 salariés) ;
  • à partir de 1 000 salariés : l’employeur met à la disposition de chaque section syndicale constituée par une organisation syndicale représentative un local convenable, aménagé et doté du matériel nécessaire à son fonctionnement.

Le droit d’usage de cet espace dédié à l’activité syndicale va-t-il jusqu’à permettre au syndicat d’y installer son siège statutaire ? Pas sans l’accord de l’employeur, répond clairement la Cour de cassation.

France télévisions demande à son syndicat CGC de déménager
Cette affaire a pour point de départ la dénonciation en 2012 par France télévisions de l’usage qui permettait jusqu’ici à tout syndicat de l’entreprise d’établir son siège social dans le local syndical mis à sa disposition. Quelques semaines après cette dénonciation, la société d’audiovisuel demande par courrier au syndicat SNPCA CFE-CGC de modifier son siège statutaire et de le fixer en dehors des locaux de la société dans un délai de deux mois. Le syndicat SNPCA refuse de déménager du local syndical et défend sa position au moyen de deux arguments :
  • en mettant unilatéralement fin à la mise à disposition du local au profit du SNPCA CFE-CGC au sein des locaux de l’entreprise, France télévisions porte atteinte au droit à l’action syndicale, qui « s’entend pour les organisations syndicales de la faculté de s’organiser librement dans toutes les entreprises » ;
  • la fin de cette mise à disposition du local contraint le SNPCA CFE-CGC à modifier ses statuts et porte dès lors atteinte à la liberté syndicale.
Pas de droit à l’établissement du siège social dans le local syndical
Saisie de l’affaire, la Cour de cassation vient d’apporter, avec une recherche apparente d’équilibre, sa réponse : « Aucune des prérogatives inhérentes à la liberté syndicale n’autorise les organisations syndicales à fixer leur siège statutaire au sein de l’entreprise sans accord de l’employeur. Il en résulte que celui-ci peut dénoncer l’usage les y autorisant sous réserve de ne pas porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la l’exercice du droit syndical« .
Pour valider la dénonciation de l’usage par la direction de France télévisions, et donc imposer le SNPCA CGC à déménager son siège social hors des murs de l’entreprise, les juges vérifient trois points :
  1. un délai raisonnable a été laissé au syndicat pour transférer son siège hors de l’entreprise ;
  2. aucun élément ne laisse apparaître que la décision n’aurait pas concerné la totalité des organisations syndicales qui auraient fixé leur siège dans l’entreprise ;
  3. l’employeur n’a commis aucun abus de son droit de propriété.

Dans la mesure où France télévisions a respecté les règles de forme liées à la dénonciation de l’usage et que rien ne laisse supposer l’existence d’une pratique discriminatoire, le syndicat catégoriel n’a pas d’autre choix que de déménager.

Source – Actuel CE