Revendiquant une hausse du Smic et des salaires, FO mobilise pour la grève et les manifestations du 19 mars également organisées par la CGT. Le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, a expliqué hier pourquoi son syndicat ne participait pas au grand débat.

La semaine dernière, la CFDT, la CFTC et l’UNSA s’alliaient à 16 autres organisations et associations pour défendre un pacte social et écologique afin de faire entendre leur voix à quelques jours de la fin du « grand débat » organisé par le gouvernement à la suite du mouvement des gilets jaunes (lire notre article). Ce collectif a notamment appelé de ses voeux « un partage du pouvoir ».

Rien de tel chez FO. « Nous n’avons jamais revendiqué un rôle de co-législateur », a précisé hier Yves Veyrier, le secrétaire général de FO, lors d’une conférence de presse à Paris. Le syndicat refuse de se situer sur le champ de l’intérêt général et répète que son rôle consiste d’abord à défendre les intérêts moraux et matériels des salariés. « Je ne suis pas non plus un opposant politique », a-t-il encore précisé tout en estimant que les politiques et gouvernements avaient « baissé les bras face au poids de l’économie en se contentant d’ajuster les dispositifs sociaux aux contraintes présentées comme incontournables de la mondialisation ».

FO n’ira pas aux dernières conférences du grand débat

Le syndicat a donc, tout comme la CGT, boudé la consultation du grand débat, et il n’ira pas non plus aux dernières conférences thématiques du 13 mars (fiscalité et dépenses publiques, organisation de l’Etat et services publics) où sont conviés les partenaires sociaux.

La démocratie directe ou référendaire ne doit pas être opposée à la démocratie parlementaire ou utilisée pour étouffer la liberté syndicale 

 

« Nous considérons que le syndicat n’a pas vocation à se substituer aux institutions et cadres d’expression citoyenne et de conduite des politiques d’intérêt général, ni à s’y trouver confondu, dissous, instrumentalisé ou muselé. FO est attentive à ce que les idées de démocratie « directe », « participative » ou « pétitionnaire », ou encore les pratiques référendaires, ne soient pas opposées à la démocratie représentative parlementaire ou utilisées pour étouffer la liberté d’association et la liberté syndicale. Nous ne voulons pas être cautions ni spectateurs de décisions prises à la suite du grand débat », a argumenté Yves Veyrier, qui a aussi pourfendu la proposition de loi sur les manifestations.

Avec la CGT également, FO appelle en revanche les salariés à faire grève et à manifester le mardi 19 mars pour faire entendre leurs revendications. Le syndicat tente donc de peser sur le gouvernement et sa majorité via le rapport de forces organisé sur le terrain social, même si, ces dernières années, comme avec la loi El Khomri, ce genre d’action n’a guère porté ses fruits.

Ces revendications sont très larges. FO réclame de porter le Smic à 80% du salaire médian, soit 1 450€ nets mensuels, de rendre obligatoire les négociations de branche dans les trois mois suivant la revalorisation du Smic (minima conventionnels et augmentations salariales), de relever le point d’indice dans la fonction publique et d’augmenter les pensions avec le retour à l’indexation sur les salaires. Le syndicat revendique encore l’arrêt de la réforme de la fonction publique, qui introduit l’équivalent du CSE, mais aussi un investissement dans les services publics. « La France a un taux d’emploi public de 89 pour 1 000 habitants, ce qui la place derrière le Canada, un des pays inspirateur de la RGPP (révision générale des politiques publiques) en son temps », remarque Yves Veyrier.

La grève, un des rares moyens de se faire entendre

Le syndicat espère conduire des manifestations dans tous les départements et estime, sur le plan de l’efficacité des revendications, qu’il faut « réhabiliter » l’exercice de la grève.

Il faut réhabiliter l’exercice de la grève  

« Il y a très peu de grèves en France, le taux de conflictualité est très faible. Or l’un des rares moyens, pour les salariés du public comme du privé, de se faire entendre est de faire grève », poursuit Yves Veyrier. Ce dernier conteste au passage que les gilets jaunes auraient obtenu beaucoup plus en quelques mois que les syndicats : « Ce qu’ils ont obtenu, et qui n’est pas négligeable, c’est un avancement de la hausse de la prime d’activité, ce qui montre d’ailleurs que le niveau actuel du Smic ne permet pas d’assurer les fins de mois.  Mais tout ce que nous avons aujourd’hui vient d’abord du combat syndical, et les syndicats continuent tous les jours d’obtenir des choses pour les salariés dans les entreprises ».

L’avenir de la sécurité sociale

A l’heure où le gouvernement tend à remplacer par l’impôt les cotisations finançant la solidarité (assurance chômage, par exemple) et où se profile une réforme des retraites « dont nous ne connaissons encore ni le calendrier ni la forme précise », le nouveau secrétaire général de FO, élu à la suite de la démission de Pascal Pavageau, défend la contribution de FO au paritarisme. Force ouvrière, a-t-il dit, a soit inspiré soit participé à la gestion paritaire de la sécurité sociale, des régimes de retraite ou encore de l’assurance chômage, avec un bilan dont elle ne doit pas rougir : « Notre système de santé, considéré comme l’un des meilleurs du monde, est le produit de la sécurité sociale ». FO revendique donc le rétablissement d’un paritarisme de gestion et la restauration « d’une gestion visant la satisfaction des besoins et non des impératifs budgétaires ».

Source – Actuel CE