Depuis ce lundi 11 juin, le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » est examiné en séance publique à l’Assemblée nationale. Outre la formation professionnelle, ce texte vise, au regard notamment de l’accord trouvé fin février par les partenaires sociaux, à réformer le système d’assurance chômage. Dans le cadre d’une rencontre organisée hier par l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis), Aurélien Taché, rapporteur LREM de ce volet « assurance chômage », et Monique Iborra, porte-parole du groupe LREM sur cette partie du texte, se sont appliqués à justifier les changements à venir.
Premier thème abordé avec les députés de la majorité présidentielle : la remise en cause de l’autonomie de gestion par les partenaires sociaux du régime d’assurance chômage. « C’est une illusion de penser que syndicats et organisations d’employeurs jouissaient d’une réelle autonomie dans le cadre de l’Unedic, relativise Monique Iborra. Le cadrage par le gouvernement était peut-être informel, mais il était bien réel. En outre, le Parlement était jusqu’ici exclu des arbitrages entre les partenaires sociaux et le gouvernement. Ce n’était pas non plus un gage absolu de démocratie ! » Un propos aussitôt soutenu par le rapporteur LREM Aurélien Taché : « Que la lettre de cadrage rédigée par le gouvernement, sur la base d’une décision démocratique, soit connue de tous est un progrès. Et il est faux de penser que l’intervention publique du gouvernement va nécessairement aller dans le sens d’une réduction des droits au chômage ».

Faut-il y voir plus qu’un coup de canif au paritarisme ? « Ce n’est pas aux partenaires sociaux que les citoyens demandent des comptes sur l’évolution du taux de chômage, répond Aurélien Taché. Il est donc normal que la majorité présidentielle reprenne la main sur le sujet. Parallèlement, la réforme du code du travail a renforcé le rôle des partenaires sociaux au niveau de la branche, et surtout des entreprises. Or c’est peut-être parce que les partenaires sociaux n’avaient pas jusqu’ici assez de liberté en entreprise qu’on a pris l’habitude de leur donner un tel rôle au niveau national, raisonne-t-il. Nous invitons maintenant les syndicats à se recentrer sur le niveau le plus proche des salariés ». « La question c’est de savoir si les partenaires sociaux ont vocation à gérer à 100% d’une politique publique, à savoir l’assurance chômage, reformule Monique Iborra. Et ce, d’autant plus que demain l’assurance chômage ne sera plus financée par les cotisations salariales mais par la CSG (contribution sociale généralisée) ».
Pour ces deux députés LREM, le changement retenu sur le financement de l’assurance chômage n’est pas neutre : « On se dirige vers la sortie d’une logique assurantielle, reposant sur le paiement de cotisations sociales, au profit de la solidarité, assurée par l’impôt qu’est la CSG », poursuit Monique Iborra. « Ce financement par la CSG permettra chaque année, dans le cadre de l’examen des lois de finances, un débat à l’Assemblée nationale sur le niveau de protection proposé par l’assurance chômage, se félicite Aurélien Taché. Notre logique, c’est qu’un euro cotisé doit ouvrir les mêmes droits pour tous. La majorité parlementaire souhaite un régime universel dispensé aux demandeurs d’emploi en fonction du niveau de revenus et non pas du statut ».
S’agissant de l’ouverture des droits aux chômage pour les salariés démissionnaires, la prudence reste de mise : « C’est un droit important, commente Aurélien Taché. Ce qui est certain, c’est que l’on ajoute un nouveau cas d’ouverture à l’assurance chômage en cas de démission pour reconversion professionnelle ou projet de création/reprise d’entreprise. Mais personne ne sait vraiment, malgré l’étude d’impact réalisée, combien de personnes vont être concernées ». Les conditions d’accès à ce nouveau droit sont en revanche susceptibles d’évoluer, prévient le rapporteur du projet de loi : « L’exigence d’une activité ininterrompue de cinq ans apparaît dans l’étude d’impact mais n’est pas dans le projet de loi. Ce critère sera confirmé par décret afin de garder une certaine souplesse de pilotage. Cela mérite en outre réflexion, car cinq ans en CDI ininterrompu, ce n’est aujourd’hui pas la norme pour les jeunes. Or notre volonté n’est pas de les exclure du dispositif », soutient-il.
Sur la lutte contre la multiplication des recours aux contrats de courte durée, la porte-parole du groupe LREM à l’Assemblée nationale a enfin tenu un discours de fermeté à l’égard du patronat : » Les ordonnances ont pris les mesures nécessaires pour sécuriser la pratique des entreprises et que le CDI redevienne la norme. Nous attendons maintenant des employeurs la contrepartie de cette sécurisation à travers une réduction du recours aux contrats courts, qui enferment une partie des actifs dans une situation de précarité ». « L’idée c’est de demander aux partenaires sociaux de regarder, secteur par secteur, comment on peut avoir moins de contrats courts, complète le député Aurélien Taché. Un bilan sera dressé en fin d’année mais nous attendons des propositions ambitieuses, en particulier des branches qui recourent le plus aux contrats précaires. Sinon, ce sera le système du bonus/malus pour tout le monde, met-il en garde. La possibilité de négocier dans les branches est déjà un cadeau offert aux organisations patronales, on ne pourrait donc pas accepter qu’une partie des branches qui consomment le plus de contrats courts échappent à la mécanique du bonus/malus grâce au travail réalisé par les autres branches ».